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02 Apr
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Le gouvernement l’assure. Pratiquer le sourçage n’entraîne aucun risque pénal. Ce sourçage, tel que défini dans le décret « marchés publics » du 25 mars 2016, représente la possibilité pour un acheteur « d’effectuer des consultations ou de réaliser des études de marché, de solliciter des avis ou d’informer les opérateurs économiques du projet et de ses exigences ». Le tout afin de préparer la passation d’un marché public. En réalité, l’article 4 de ce décret ne fait qu’encadrer une pratique déjà appliquée par un grand nombre de pouvoirs adjudicateurs. Il pose toutefois quelques limites. Ainsi, ces échanges préalables ne doivent pas avoir « pour effet de fausser la concurrence » et ne peuvent entraîner « une violation des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ».

Délit de favoritisme

Selon le cabinet d’Emmanuel Macron, tant que l’acheteur public respecte les dispositions du décret, il ne peut être inquiété par un quelconque risque pénal. C’est d’ailleurs afin d’éviter ce risque que cette « consultation des fournisseurs » aurait été inscrite dans le décret. Oui mais alors, pourquoi le gouvernement réfléchit-il à insérer dans le projet de loi « Sapin 2 », relatif à la lutte contre la corruption, l’amendement porté par le sénateur Philippe Bonnecarrère (Tarn, UDI-UC), qui vise notamment à inciter les acheteurs au sourçage en allégeant le risque pénal lié à cette pratique ? Cet amendement, initialement prévu pour le projet de loi de ratification de l’ordonnance « marchés publics » du 23 juillet 2015, a en effet pour but de punir les acheteurs favorisant délibérément une entreprise, et non ceux commettant une erreur matérielle. L’exécutif semble donc bien conscient du risque, et comprend, même s’il souhaite le cacher à la presse, l’inquiétude qui agite une partie des acheteurs publics. Une inquiétude liée à la proximité ressentie entre le sourçage, le conflit d’intérêt et, surtout, le délit de favoritisme.

La menace du juge pénal

Un autre problème existe : le manque de précision de l’article qui encadre cette démarche. Se pose, par exemple, la question d’un délai entre cette phase de consultation et le lancement de la procédure. Pour l’instant, la seule précision dont disposent les acheteurs à ce sujet, c’est la notion de délai raisonnable, qui sera laissée à la libre appréciation du juge. Ce manque de détails n’est pas inhabituel. C’est, en général, le Conseil d’Etat qui vient clarifier les dispositions réglementaires. En revanche, si le juge administratif n’est pas saisi rapidement sur ce terrain, le juge pénal risque de prendre les choses en main avec des moyens beaucoup plus importants et une vision uniquement pénaliste, peu soucieuse de la stabilité des relations contractuelles. Il est effectivement tout à fait autorisé à juger des affaires de conflits d’intérêt ou autres délits de favoritisme. Mais est-ce réellement l’autorité la plus compétente pour apprécier les spécificités du droit de la commande publique ?